Modélisation des éruptions volcaniques : magma, bulles et coalescence (2/2)

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Séminaire Modèles et Algorithmes Déterministes: MODANT

21/05/2014 - 11:15 Mme Simona Mancini (Université d'Orléans) Salle 1 - Tour IRMA

La compréhension des mécanismes éruptifs est à la base de la prévention des risques liés aux volcans ainsi que de l'étude de la construction de la croûte terrestre. Les éruptions volcaniques sont classées en deux types : les effusives et les éruptives. Une éruption effusive se caractérise par l'émission séparée de magma et de gaz, le magma formant un dôme ou une coulée de lave, le gaz étant dispersé dans l'atmosphère. Au contraire,  une éruption explosive est caractérisée par la fragmentation du magma et la propulsion brutale dans l'atmosphère de gaz pressurisés et de morceaux de lave. Certains volcans (comme la Soufrière de Montserrat, Caraïbes) voient les deux types d'éruptions se produire successivement sur quelques jours ou quelques mois. Le type d'éruption ne peut donc pas seulement s'expliquer par la chimie du magma contenu dans le volcan, et d'autres facteurs doivent entrer en jeu.

La modélisation des éruptions volcaniques a permis de cerner ces autres facteurs en se concentrant sur l’évolution du magma dans le conduit volcanique. Comme le montrent des expériences de laboratoire récentes, cette évolution est non seulement liée à la physico-chimie du magma (plus ou moins dense, riche en cristaux, etc.), mais aussi à la facilité qu’a le gaz contenu dans des bulles de s'échapper du magma. Les bulles de gaz, qui apparaissent en profondeur, grossissent et coalescent pendant la remontée dans le conduit. Si la coalescence des bulles permet la formation d’un chemin à travers lequel le gaz peut s'échapper, l'éruption sera de type effusif. Si ce chemin ne se forme pas, le magma dans le conduit arrive en surface chargé du gaz resté emprisonné et une éruption explosive s’ensuit.

L'étude et la modélisation mathématique d'un tel processus physique complexe, repose sur des expériences du laboratoire qui recréent des bulles de gaz dans des conditions proches de celles d’un conduit volcanique. Nous allons dans la première partie de l'exposé décrire les principaux mécanismes mettant en jeu ces bulles de gaz (nucléation, croissance, coalescence et effondrement) via l'analyse de données expérimentales. Nous verrons aussi dans quels domaines la modélisation des processus fait défaut, ce qui permettra de replacer notre collaboration dans le contexte des grandes questions de la volcanologie. 

La deuxième partie sera consacrée aux aspects plus mathématiques de la dynamique des bulles de gaz dans un magma. Dans un premier temps, nous modélisons le processus de croissance des bulles en considérant les bulles isolées et immergées dans un volume d'influence du magma (modèle microscopique). Ceci mène à un système d'équations différentielles non-linéaires décrivant l'évolution du rayon et de la masse d'une seule bulle croissant par décompression et diffusion, couplées avec une équation d'advection-diffusion donnant la variation spatio-temporelle de la concentration du gaz dissout dans le liquide magmatique. Ce modèle, proposé dans les années 80 est actuellement le modèle de référence en volcanologie. Nous présentons une étude du modèle et une discrétisation numérique, ainsi que sa validation par comparaison avec des résultats expérimentaux. Ensuite nous présentons un modèle statistique de type cinétique décrivant l'évolution d'une population de bulles qui croissent par décompression, diffusion et coalescence. Ce modèle mésoscopique, déduit du modèle précédent, décrit l'évolution d'une fonction distribution (définie sur des variables non-standards) pour des évolutions du système physique à l'équilibre thermodynamique ou pas. Il représente une avancée importante pour la communauté volcanologique. Nous verrons comment ce modèle est un outil de test de différents mécanismes physiques régissant la coalescence des bulles. Nous présentons des résultats numériques, et les comparons avec des données expérimentales. Nous discuterons aussi des améliorations et axes de recherche futurs liés à ce problème.